samedi 8 janvier 2011

Jean Giono : La chasse au bonheur.

Il est évident que nous changeons d'époque. Il faut faire notre bilan. Nous avons un héritage, laissé par la nature et par nos ancêtres. Des paysages ont été des états d'âmes et peuvent encore l'être pour nous-mêmes et ceux qui viendront après nous; une histoire est restée inscrite dans les pierres des monuments; le passé ne peut pas être entièrement aboli sans assécher de façon inhumaine tout avenir. Les choses se transforment sous nos yeux avec une extraordinaire vitesse. Et on ne peut pas toujours prétendre que cette transformation soit un progrès. Nos "belles" créations se comptent sur les doigts de la main, nos "destructions" sont innombrables. Telle prairie, telle forêt, telle colline sont la proie de bulldozers et autres engins; on aplanit, on rectifie, on utilise; mais on utilise toujours dans le sens matériel, qui est forcément le plus bas. Telle vallée, on la barre, tel fleuve, on le canalise, telle eau, on la turbine. On fait du papier journal avec des cèdres dont les Croisés ont ramené les graines dans leurs poches. Pour rendre les routes "roulantes" on met à bas les alignements d'arbres de Sully. Pour créer des parkings, on démolit des chapelles romanes, des hôtels du XVIIème, de vieilles halles. Les autoroutes flagellent de leur lente ondulation des paysages vierges. Des combinats de raffineries de pétrole s'installent sur des étangs romains. On veut tout faire fonctionner. Le mot "fonctionnel" a fait plus de mal qu'Attila; c'est vraiment après son passage que l'herbe ne repousse plus.

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Jean Giono est sans doute l'un des plus brillant esprit et l'un des plus grands écrivains français du 20ème siècle. Son "hussard sur la toit" en est la plus belle preuve, style et fond réuni autour d'une merveilleuse histoire humaine. Je n'ai que de bons souvenirs de jeunesse quant à mes lectures de Giono. Des souvenirs d'été et de lecture sous les arbres dans la torpeur d'une fournaise de juillet ou d'août.

Pour moi, Giono, c'est un peu la figure du sage (on va dire du druide pour faire plaisir aux lecteurs païens de "Racines"). Ce genre de conscience ancestrale fait grandement faute à une époque où la plupart de nos anciens sont infantilisés et crétinisés à l'image des autres générations.

Il faut lire et relire Giono comme il faut lire et relire Bloy, Céline, De Maistre, d'Annunzio, Nietzsche, London, Kipling, Orwell ou Spengler !

Pour conclure plus précisément sur le texte et rien que le texte j'invite les lecteurs de "Racines" à découvrir le livre de Günter Anders : "L'obsolescence de l'être" qui définit assez bien la finitude de ce plan de déshumanisation massive que constitue l'utilitarisme moderne. L'homme, en fin de compte, finit par devenir nécessairement gênant.

A quand le scénario du film "Soleil vert" ?

Anonyme a dit…

Erratum.

Le livre de Günter Anders a pour titre : "L'obsolescence de l'homme".

Mille excuses !

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